Nous sommes arrivés assez tard dimanche suite à notre repli de la veille provoqué par plusieurs personnes nous cherchant Elisabeth et moi nominativement et en arabe (supposé police étrangère) et après avoir pris la mesure de la situation pendant plusieurs heures au téléphone.
Là nous avons aidé à la distribution de nourriture pris des nouvelles de tout le monde et essayé de voir à palier aux besoins de tous. Le campement en bas de la butte est toujours là et toujours aussi discret même s’il paraît mieux organisé pour éviter que la pluie ne les atteigne, la pluie est relativement rare… L’après-midi sera douce et dans la bonne humeur. Très peu de monde joignable un dimanche…
A 16h on retrouve une autre personne qui s’occupe d’autres Tunisiens ailleurs et en passant devant eux la sécurité du parc nous dit bonjour. On doit commencer à faire partie du décors grâce à l’inactivité de la mairie et des associations alors que nous souhaitons partir le plus tôt possible…
Là cette personne nous expliquera que les Tunisiens dont elle s’occupe ont subit des jets de gaz lacrymogène et qu’elle a constaté de grand nombres de contrôle d’identité, très ciblés sur les Tunisiens, autour de la mairie du XIX.
On lance aussi l’idée de faire venir des célébrités en soutien à nos amis pour qu’enfin les médias se déplacent… Pour le moment deux personnes ont été contactées par l’intermédiaire d’une amie artiste qui nous soutient aussi et qui a fait joué son carnet d’adresse. En attente de réponse et d’avancées sur ce point !
Posé dans le campement du bas les Tunisiens présents me forcent à accepter une banane (j’essaye de ne jamais accepter pour ne pas taper dans leurs stocks et on grignote au café quand on va y recharger nos téléphones), ce sera mon seul repas du midi, pour certains le leur aussi (mais ils se rattraperont dans l’après-midi avec une marmite de pattes apportée par un soutien).
Nous retournons justement au café pour écrire la journée précédente sur un ordinateur portable prêté pour l’occasion (je ne manquerai pas de vérifier qu’il n’est pas infesté de virus et de gueuler parce qu’il est sous Windows) et on retourne sur place après avoir cherché sans succès des cigarettes.
Puis tout démarre très vite aux alentours de 22h, alors que nous sommes occupés à négocier avec les gardiens pour rester et ne pas avoir à sortir pour revenir des bruits de dispute se font entendre, tout le monde coure : un des vigiles du 36 aurait insulté un de nos amis Tunisiens dans des termes racistes ce qui a mis le feu aux poudres et a, encore, amené les vigiles à appeler la police. Deux patrouilles arrivent, discutent, pas vraiment calmes et nous demandent encore qui nous sommes nous, blanc-becs qui n’ont pas peur de dormir avec des arabes, avant de nous prendre de haut.
Après avoir démêlé la situation et l’avoir expliqué aux policiers ceux-ci partent en ne manquant pas de nous conseiller de les appeler si les gardiens se comportent mal. Quand je leur dit qu’ils viennent d’insulter un Tunisien l’un des policiers me répondra laconiquement « ah bah ça… »
Le gardien a fini sa ronde, les Tunisiens sont à l’intérieur on retourne charger nos téléphones et constate que le café dans lequel nous avons nos habitudes est fermé, trop tard, trop dimanche. On pousse plus loin jusqu’à la station Pyrénées où on mangera un morceau et rechargera pendant un peu moins d’une heure.
Puis sur le retour une femme tambourine à la porte du mac donald’s fermé dont les employés ne comprennent pas la situation, on finit par comprendre qu’une personne vient de se défenestrer de chez lui dans la rue et sous les yeux de la dame en question qui n’a pas de téléphone pour prévenir les secours. Je cours, téléphone en même temps et essaye de prendre le pouls de l’homme qui gît inanimé par terre avant de me rendre compte que son crâne est explosé par terre et qu’il n’y a donc plus rien à faire.
Les pompiers arrivent, nous demandent de circuler et la police me rappellera plus tard pour prendre mon témoignage, bien maigre, sur place. Entre temps ils n’avaient pas évacué le corps et avec la pluie qui avait recommencé à tomber du sang commençait à envahir le trottoir.
De retour au parc dans un état second on s’installe et dort au milieu des autres Tunisiens et rejoints par un 3e français. La nuit se passera bien jusqu’au réveil du matin par la sécurité en vélo du parc qui restera à nos côtés pour s’assurer que tous les Tunisiens sont bien réveillés et les affaires pliées.
Le 19/06/2011
Commentaires récents