Troisième jour pour nous dans le parc des Buttes Chaumont en soutien aux Tunisiens réfugiés du 36 rue Botzaris… Du moins c’est ce que nous croyions. L’ambiance était la même que les jours précédents : la bonne humeur, la fatigue, la DCRI qui tourne, … La pluie est toujours là, les solutions toujours absentes.
Et puis les hostilités commencent assez tôt avec un gardien du parc qui découvre un des campements de nos amis tunisiens et nous explique que le règlement interdit de dormir dans le parc. C’est pas comme si on l’avait expliqué douze fois et demi en 3 jours, on recommence à expliquer au monsieur qui fera preuve d’une manifeste mauvaise fois tout du long de la conversation. Jusqu’à énerver un de nos amis qui n’a pas dormi depuis 72 heures et que l’on trouve finalement le même accord que d’habitude : on n’a rien vu, rien entendu, respectez le lieu…
Pendant la discussion un passant (dont je finirai par apprendre l’identité, et que je connais par ailleurs de mon combat pour un Internet libre) prend des photos de la discussion, agents de sécurité de dos… Ceux-ci lui intiment l’ordre d’arrêter et vont relever son identité, pour « vérifier que les photos ne se retrouvent pas sur Internet ».
Petit moment épique de la journée quand une famille s’installe sous la tonnelle que l’on occupe principalement quand il pleut pour faire une soirée d’anniversaire à leur petite fille. On les approche, discute avec eux, leur explique la situation puis on essaye de quitter la place pour la leur laisser quand il fait beau. Ce sera de courte durée.
Grâce à Twitter le patron du Café des Petits joueurs nous propose de nous approvisionner en cafés. Nous y allons à 3 français pour récupérer 3 thermos (environ 90 cafés), des gobelets et des sucres qui redonneront un peu de force aux Tunisiens et leur rendront temporairement le sourire.
En revenant on constatera que, sous la pluie, la tonnelle s’est naturellement organisée pour laisser la place à l’anniversaire d’une part et l’autre aux tunisiens, dans une entente parfaite. Les familles des enfants sont curieux mais extrêmement compatissants – on leur servira des cafés…
Avec la pluie les couvertures sont trempées, on se demande tous comment on va passer la nuit… On a faim, sommeil, …
Arrivent quelques français en soutien, dont une qui nous fera des provisions pour tenir largement la journée (il en reste encore un peu à l’heure où j’écris) et apportera quelques couvertures et pulls qui nous aideront bien !
Puis vers 19/20 le parc est évacué, tout le monde dehors, avis de tempête !
Vérifications faites sur Google puis météo France le vent est à 27 puis 35km/h et la vigilance jaune (« ne pas pratiquer d’activités risqués météoroligiquement ») et l’alerte finira par nous arriver en même temps que la police.
Nous avons entre temps contacté le cabinet du maire qui nous a expliqué la situation d’un point de vue politique et la situation est loin d’être reluisante : du budget a et va continuer a être débloqué, c’est par contre aux associations de s’occuper de toutes les formalités techniques pour qu’enfin les Tunisiens soient respectés dans leur dignité…
Les associations elles disent ne pas avoir touché d’argent et que la somme prévue n’est de toutes façons suffisante qu’à maintenir les 300 logements là où il en faudrait 600 actuellement… Aucune situation n’est avancée de ce côté-là non plus.
Le parc est maintenant fermé, nous avons des informations sur des contrôles d’identité massifs aux alentours du parc, et d’autre sur des rondes autour du parc. Le doute sur l’alerte météo n’est pas dissipé et l’on commence à avoir peur d’être dans une souricière géante en vue d’une interpellation imminente de tout le monde.
La police met un peu la pression, on nous demande de quitter le parc pour ne pas mettre en danger la responsabilité de la mairie ou du responsable du parc. Heureusement les patrouilles présentes sont de ceux à qui nous avons déjà expliqué la situation il y a 2 jours et qui compatissent réellement à la situation.
Nous sommes donc finalement mis à la porte sans aucune solution pour se retourner. Un des gardiens nous conseille de revenir à 22h et d’être discrets, comme les jours précédents finalement, l’énervement en plus.
On se réfugie au café pour être sûrs d’avoir de la batterie dans le téléphone pour la nuit, puis on retourne dans le parc qui n’est jamais fermé pour tout le monde…
En effet, une “Boum” Party privée a lieu dans le restaurant des Buttes Chaumont qui accueille facilement 200 personnes qui feront la fête toute la nuit. Alors que je le rappelle il y avait un avis de tempête.
On s’installe volontairement à l’écart, comme les quelques Tunisiens qui ont décidé de passer la nuit dans le parc plutôt que d’errer dans la rue ou de se loger chez un franco-tunisien qui va accueillir 12 personnes dans un studio de 18m². Je m’endors assez vite alors qu’Elisabeth ne va pas y arriver et retrouvera d’autres soutiens français qui croiseront une personne, typée français qui demandera une cigarette avant de réapparaitre plus tard avec plusieurs arabes qui manifestement nous cherchaient d’après ce qu’Elisabeth a compris des discussions en arabe.
A 4h nous décidons de partir et de laisser certaines de nos affaires sur place, nous utilisons Twitter pour prévenir tout le monde que la situation est électrique et que si nous ne réapparaissons pas c’est mauvais signe… On croise un français (?) qui nous amènera vers la sortie avant de nous faire patienter pour nous ouvrir, on décide de ne pas attendre et de contourner par notre entrée/sortie personnelle, lui nous conseillera « attention où vous allez » en chantant d’un air guilleret. Direction une propriété privée qui nous est mise à disposition pour la nuit.
On a un peu dormi jusqu’à 11h / midi et passé plus de 2 heures au téléphone pour prendre la température de la situation avant de retourner sur place. Encore une journée à #Botzaris36 sans aide aucune…
Le 18/06/2011
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